Cette science récente dérivée de la physique m’a tant fasciné durant mon adolescence que je me tiens toujours informé de ses avancées malgré mes divers centres d’intérêt d’aujourd’hui.
Je pressentais lorsque j’avais seize ans que l’électronique alors naissante allait bouleverser le monde et participer à un changement radical de la société. Peu à peu, je suis passé de l’étude de l’électronique à l’étude de la physique ; mais les progrès de cette dernière dépendaient des progrès de la première. Il y a en fait une boucle systémique entre l’électronique et la physique. C’était l’époque où les électroniciens portaient une blouse blanche comme les médecins dans un hôpital. Ce n’était pas la science des prolétaires comme ça l’est devenu par la suite. L’électronicien était détenteur d’un savoir d’avant-garde qui allait révolutionner la société. A présent l’électronique est banalisée et fait partie de notre quotidien. Plus personne n’est fasciné par le mot « électronicien » et la profession est rabaissée au rang d’un simple technicien qui vient réparer votre machine à laver. Il n’y a que le titre « d’ingénieur en électronique » qui garde encore un peu de son prestige. On l’imagine en train de concevoir des robots qui viendraient assister l’homme dans ses travaux les plus difficiles.
Que n’ai-je pas rêvé devant un simple transistor de puissance. Ce composant qui chauffait beaucoup était la plupart du temps affublé d’un radiateur dont l’esthétique me fascinait. J’ai fait bien des calculs et des prototypes de petits systèmes électroniques. Et ce qui était pourtant rationnel relevait pour moi de la magie. Ces électrons dans la matière me plongeaient dans d’infinies rêveries. J’imaginais le courant électrique qui passait d’un composant à un autre avec une certaine mystique.
Aujourd’hui j’ai conservé ce regard lorsque je mets en marche mes ordinateurs. Et chaque fois que j’appuie sur le bouton « On/Off », une bouffée de mon adolescence remonte à la surface de mon esprit. Je sais que j’avais vu juste et que ces simples transistors déboucheraient sur des architectures complexes qui battent les champions aux échecs. Ce que je regrette un peu est la banalisation de l’électronique et que le métier d’électronicien ait perdu beaucoup de son prestige. Pourtant le XXIe siècle sera celui de l’électronique et de ses prouesses qui dépasseront de beaucoup l’imagination du commun des mortels ●