Interculturalité et proxémie

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Le comportement de chacun nous apparaît au quotidien comme allant de soi et surtout comme étant universel. Or il n’est rien de plus erroné que cette croyance en l’universel. En effet chaque culture possède ses codes, et dans ceux-ci nous allons nous intéresser plus particulièrement à la gestion de l’espace.

Nous utiliserons pour ce faire les travaux de Edward T. Hall qui, dans ce domaine, ont apporté des théories originales. L’auteur s’est intéressé à l’éthologie animale et humaine car ces deux domaines sont complémentaires. Nous porterons notre attention plus particulièrement sur son ouvrage intitulé dans la traduction française : La dimension cachée, publié aux éditions du Seuil.

Même si le contexte lié à l’époque a un peu changé, les théories sur la proxémie restent toujours valables à notre époque actuelle. Nous laisserons volontairement de côté ses études sur l’éthologie animale pour nous concentrer sur tout ce qui relève de l’humain.

Hall est un fin observateur et c’est ainsi qu’il réussit à théoriser les distances entre les individus. Après quelques expérimentations avec un collaborateur linguiste, il en arrive à déduire les quatre principales distances dans la communication humaine. Il les nomme :

– distance intime ;

– distance personnelle ;

– distance sociale ;

– distance publique.

Ces différentes distances ont été élaborées à partir de la manière dont on communique oralement. Cela va du chuchotement à la performance du comédien de théâtre. Toutefois il n’y a pas que l’oralité qui entre en ligne de compte, même si celle-ci est très importante. Il y a également l’importance du champ visuel ainsi que l’olfaction. Ces diverses théories ont été élaborées à partir de l’expérience et l’expérimentation. Ceci a son importance pour montrer que ses propos puisent leurs sources dans une pratique de terrain.

Porte ouverte ou porte fermée

La proxémie ne s’intéresse pas seulement aux distances entre les individus mais aussi à tout ce qui est en rapport avec la gestion de l’espace humain. Et toute architecture comporte ce que l’on peut appeler au sens large des portes. Et selon les cultures les portes sont fermées ou ouvertes selon certaines circonstances, et même parfois un simple rideau fait usage de porte.

Hall a constaté qu’en Amérique du nord, lorsque les gens sont disponibles, ils laissent la porte entrouverte. Pour un américain une porte non fermée ne dérange pas, alors qu’en Allemagne tout doit être soigneusement fermé et les chaises doivent rester à leur place. Ainsi l’espace social et architectural est traité de différentes façons selon les cultures. Ces différences créent parfois des malentendus lorsque des hommes entrent en contact.

On remarque par exemple que dans certaines cultures orientales le rideau remplace la porte. Il n’y a donc plus d’isolation phonique mais une communication « permanente » où chacun entend ce que fait et dit l’autre. La notion d’intimité n’a donc rien d’universel et diffère selon les cultures, tout comme la mobilité des meubles dans un appartement ainsi que nous le montre la culture japonaise.

Les cultures à contact et celles sans contact

Comme l’a remarqué Hall, Il y a aussi bien chez les animaux que chez les hommes, des cultures à contact et des cultures sans contact. L’entassement est le fait de certaines cultures alors que d’autres conservent leurs distances. Par exemple un anglais se sent très mal à l’aise dans un métro japonais où les passagers sont entassés. On peut dire que les orientaux possèdent plus des cultures à contact que les occidentaux. Les orientaux s’agglutinent plus entre eux, sans craindre de se toucher.

En prenant des photographies d’une file d’attente dans différents pays, on s’aperçoit rapidement que les distances entre les individus varient fortement selon les cultures. Ce qui crée souvent des tensions lorsque des personnes de diverses origines se rencontrent, par exemple dans un lieu public.

En France à peine frôle-t-on une personne que nous nous excusons immédiatement. Dans d’autres cultures, comme celles des pays africains, frôler une personne n’a pas les mêmes répercussions dans le comportement.

L’avenir de la proxémie

Il y a de nombreux anthropologues qui ont pris conscience du rôle de l’espace dans le comportement humain. Toutefois Hall est un auteur important dans la théorisation de cet espace. Il nous parle notamment de l’importance de l’espace dans les projets urbains. Trop de villes ont été bâties sans se soucier de la manière dont les habitants occupent l’espace. C’est le cas par exemple des grands ensembles que l’on qualifie de « cages à lapins » ou de « villes-dortoirs ». De plus la culture des habitants n’a pas été prise en compte. Une personne de culture nomade ne restera pas dans un appartement, aussi grand soit-il. Ceci est un exemple parmi d’autres.

Il reste donc de nombreuses questions à résoudre, et le travail des anthropologues et des sociologues est très loin d’être complet

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